La course
Je cours. Je ne pense pas que je suis meilleure que personne à cause de ça.
J'ai commencé quand j'étais ado. Mais je n'ai pas été constante depuis tout ce temps : certaines années, j'allais plutôt au gym. J'ai eu des périodes inactives. J'ai pas mal toujours eu une ou deux machine(s) d'exercice chez moi, donc parfois c'était ça.
Depuis 2012 par contre, je cours sans arrêt. J'ai fait mon premier demi-marathon en 2013 -ça a tellement mal été!-, puis 4 autres depuis. Autour de 1 500 km par année en moyenne.
Les gens m'en parlent souvent. Il y a habituellement deux attitudes : un peu admirative ("tu es tellement bonne de le faire"), ou encore légèrement sarcastique ("c'est vraiment à la mode de courir, hein?) Je trouve que les deux ne sont pas vraiment ça.
D'abord, je ne suis pas "bonne". Je n'ai aucune, mais alors AUCUNE aptitude naturelle ou habileté athlétique. Je n'ai pas une volonté de fer non plus. Ça ne me tente pas souvent d'y aller, et encore moins l'hiver. Mais la seule chose que j'ai je crois, c'est une capacité de ne pas m'écouter et de le faire quand même. Je le mets à l'agenda et je l'inclus dans ce que j'ai à faire dans ma journée. Ça rentre dans la catégorie de toutes les corvées que je dois simplement faire, que j'aie envie ou pas. Je suis bizarre comme ça : si j'ai une liste, un programme ou une app qui me dit que je dois faire quelque chose, je le fais sans me poser de question.
Je ne sais pas comment réagir non plus quand on me dit que courir est une mode. Je me sens un peu comme si je devais m'excuser de le faire? Il y a des raisons qui expliquent cette popularité : ça ne coûte rien, on peut le faire n'importe ou, n'importe quand, à son rythme. Je ne pense pas que courir fait de moi quelqu'un de spécial, mais personne ne peut poursuivre et progresser dans un sport à long terme simplement à cause d'un effet de mode. Surtout pas, disons, quand il fait -19 et qu'après 40 minutes d'intervalles, on sent le sang commencer à tourner en slush dans ses cuisses. Bref, je ne veux pas de médaille, mais ce n'est quand même pas tout le temps si facile, et je ne pense pas mériter non plus de moqueries pour avoir par hasard accroché à un sport que beaucoup d'autres personnes pratiquent.
Pourquoi je cours? C'est un mélange de plein de raisons : je suis introvertie, alors le fait que ce n'est pas social comme activité en général m'aide à recharger les batteries. Je n'ai jamais été bonne dans aucun sport, donc la course me permet de me comparer seulement avec moi-même (et avec le temps dans mes courses officielles je suis passée de "terminer en dernier avec les personnes âgées" à "rejoindre parfois la moyenne", ce qui est un grand exploit!) Mes problèmes d'équilibre et de coordination font que je n'ai jamais été capable de suivre des cours de groupe comme l'aérobie et la danse. Et j'ai beau chercher, mais je n'ai trouvé aucun sport aussi flexible, aussi simple, et qui "dépense" autant en relativement peu de temps.
Je cours surtout parce que j'en ai besoin. Si je ne le fais pas, je dors mal, je me sens mal, ma tête va vraiment moins bien. Même si ce n'est rien de conscient, c'est un moment où je me défoule, et où je médite un peu aussi. Où je règle mes bibittes et mes affaires. Simple de même.
Je sais que c'est n'est pas pour tout le monde. Ça n'a pas besoin de l'être! Mais je pense quand même que tout le monde aurait intérêt à bouger. Vélo, marche, tennis, zumba, yoga, balle molle, arts martiaux, muscu au gym, spinning, what not! La vie va juste vraiment mieux quand on se dépense. Le temps? On a toujours le temps pour prioriser ce qu'on veut faire. Sans virer fou non plus là! Je trouve constamment des stratégies pour que mon jogging "rentre" dans ma vie. Comme aller chercher ma fille en joggant (8 km aller-retour) une fois par semaine jusqu'à ce qu'elle pèse 40 livres et que je ne puisse simplement plus la pousser! Aller reconduire mon fils à l'école à pied puis revenir en joggant avec un léger détour. Parfois même faire des petites commissions pendant mon jogging, comme aller porter quelques livres à la bibliothèque municipale avec un sac à dos, aller au guichet, passer vite-vite à la pharmacie... Quand on veut, on peut.
Je ne dis pas ça pour faire de la pression à qui que ce soit! Tout le monde a bien le droit de faire ce qu'il veut, et bien entendu de ne rien faire. Mais... c'est juste une question de gros bon sens? Je me souviens encore, dans une période creuse, d'avoir dit à une amie super-sportive que je n'avais aucune énergie pour m'entrainer, avec les enfants, le travail et tout. Au lieu d'être sympathique à ma cause, elle m'avait tout simplement répondu, sans aucun jugement mais fermement, que justement il fallait bouger un peu pour en avoir, de l'énergie. Ça ne me tentait tellement pas qu'elle ait raison!
Mais damn, elle avait raison.
Je remarque que souvent, les gens qui ont la 2e attitude sont des gens qui ne bougent pas. J'avais comme une sorte d'intuition que leur commentaire était peut-être finalement en rapport avec eux-mêmes, et non pas envers moi. Jusqu'à ce qu'un jour une autre amie me confie que si elle disait ça, c'était parce que le fait que je coure la faisait sentir très mal étant donné qu'elle ne le faisait pas. Et encore une fois je ne sais pas quoi répondre à ça! Je ne demande à personne de courir, je ne dis pas que c'est une fantastique secte dont seuls ses adeptes peuvent connaître les réponses aux grandes questions de la vie! Mais ça me rend un peu confuse. Est-ce que je suis supposée arrêter pour ne pas que les gens se sentent mal? Ce n'est tellement pas mon but de "déranger" à cause de ça!
Je partage rarement des photos ou des statistiques sur mes courses dans les médias sociaux. (Celles que j'inclus ici, c'est pas mal ça depuis 3 ans). J'ai justement peur d'avoir l'air de me vanter de le faire, à cause de tels commentaires. Je mets quand même quelques courses spéciales : demi-marathons ou courses en vacances. J'espère que ça passe quand même -si je mets 2 ou 3 courses par année, ça veut quand même dire qu'il y en a 150 que je vous épargne! :-)
Et non, je ne suis pas "bonne" de courir même en vacances non plus! Le jogging en vacances, c'est le bonbon dans la vie d'un coureur. Lorsqu'on refait toujours les mêmes trajets qu'on finit par connaître par coeur, on attend ces courses trop rares avec tellement d'impatience! Et on les vit à fond; mes plus beaux souvenirs de course, ce sont ceux-là.